Pourquoi peindre sur polygones curvilignes ? Ces formes "bizarres" , "Baroques" , me semblent exprimer mieux le monde de la Vision qui, par son essence même , n 'est pas définie dans une forme géométrique précise , et surtout pas dans celles aussi symétriques et angulaires du rectangle ou du carré . Comme l' a dit PLATON : " Dans le domaine de l'Apparence, tout est affaire de perspective". J'aime imaginer que la pensée est un principe féminin, aux formes rondes, et qui, en se matérialisant, s'offrirait à la caresse du geste et du regard . La pensée-vision , loin du cadre est plus difficilement maîtrisable , moins contrôlée, moins disciplinée . Elle est ! c'est tout. Par ses formes et ses limites non conventionnelles, elle possède une existence propre , elle se déploie au-delà de son interprétation première, pour continuer à vivre et évoluer dans le souvenir plus ou moins précis des mémoires de ceux dont elle aura su capter l'attention . Parallèlement à cet épanouissement bi-dimentionnel , la représentation de la pensée-vision est traduite en profondeur par de nombreux glacis cristallisant la couleur et la mêlant intimement à la lumière , en nous offrant une jouissance de l'oeil , ainsi qu'un véritable appel au toucher. La toile prend alors un sens pour moi-même, se révélant dans sa finitude . Je lui donne souvent un titre , mais sa vraie signification, plus profonde, plus cryptée, est celle qui en même temps m'échappe .S'ouvrant vers le subconscient, réceptacle de la vision, elle réside hors du thème apparent et à fortiori du temps et de l'espace. Sa troisième dimension , la plus intéressante, est celle qui se nourrit de l'interprétation de chacun à travers son inné et son acquis , à travers son "prisme déformant" . Par ces différences , le tableau gagne en liberté , résonne et vibre de multiples façons en animant des sensations diverses, complicités , oppositions et controverses. Cette liberté de chacun est primordiale, elle est mienne à travers les lectures que chacun donne de ma peinture. J' y trouve la contradiction , mais aussi la corrélation, et donc l' harmonie .